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> Les Oblongues

Mises à Nu

 

Mettre à nu la peinture pour faire un pas de côté. Déshabillage et ouverture du corps de la peinture à la recherche d’un relief et d’un creux. La peinture en tant que matière à remettre en scène, de son extrême finesse au travail de l’épaisseur. Une mise à nu sans mariée ni prétendant. La matière est  à vif pour mieux en révéler les ressorts et percer son mystère. Le but est de souligner les tensions et les interactions du fond-forme-couleur, mus par la volonté de voir la matière autant qu’elle se cherche elle-même des yeux pour nous voir.

 

« La  sculpture à l’huile » est ici développée dans son assertion première d’ôter et de donner vie. Modeler les sensations par la mise en tension de l’aplat et du jaillissement. Faire saillir la couleur des épaisseurs par la taille directe, le trait sculpté. Faire émerger les images par les incisions et les ciselures creusées dans le corps de la matière. Le travail par-dessous  apparaît au-dessus. La peinture s’affranchit de la toile pour mieux être tâtée par l’œil.

 

L’Oblongue est une forme minimale captivante aux contours variables qui se révèle au sein de la matière tout en veillant à maintenir la peinture comme motif en soi. Cette série se décline comme une porte d’entrée sur une galerie d’humeurs et d’identités.

Les Oblongues se réfèrent aux différents masques que revêtent nos identités dans les sociétés dites modernes. Ces objets-images rituels sont mis en exergue, comme ces profils que nous fabriquons sur les réseaux sociaux, participant à la réinvention de soi.  Le pixel « tribal » ici est palpable et identifiable. Le toucher et la vue découvrent un nouveau territoire dans la peinture sculptée.

Ces motifs permettent aussi d’entrevoir les images mentales derrière les apparences, à la manière de l’imagerie par résonance magnétique, une plongée dans nos cerveaux.

 

L’Oblongue se réfère à la recherche contemporaine sur le cortex cérébral et ses processus. Elle tente de cerner l’image en tant que tatouage invisible qui nous façonne. Et acquiert ainsi sa propre forme dimensionnelle, celle d’une vanité heureuse et d’une Hétérotopie.

Cet espace est travaillé par le temps. Différentes temporalités s’expriment par les procédés de sculpture, de gravure et de tissage qui composent les tableaux sous le tableau. L’étirement du temps est signifié par l’étirement de l’espace. L’éclatement de la matière, à la limite de l’usure, transcrit les mouvements et les transformations perpétuels. Par l’arrachement et l’effritement apparaît la forme, résultat de fouilles archéologiques.

 

Des travaux de réfaction du neuf sont menés, une ruine neuve est mise à jour. A la fois peinture en ruine et peinture en vie, donnant naissance à la ruine dynamique, cet écart entre beauté et délabrement.

S’évader de la simple surface plane par la surface plane sculptée, créer des perspectives et des points de vue complexes à concilier, mêler la vue de haut, de très près ou de loin, tels sont les effets qui permettent l’accélération et le ralentissement du regard et qui aboutissent à une sensation de glissade. Une icône dans laquelle on pénètre, où on peut passer la tête et le corps.

 

 

 

 

© ​Eloi Derôme 

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